Une journée de repos. La plupart des gens se seraient réjouis d’obtenir ainsi une journée de repos. Ce n’était pas le cas de Lyanna Moriarty. Elle ne craignait pas le surmenage, elle n’avait pas besoin de journée de repos. Encore dans son lit, alors que le soleil s’était déjà levé depuis de nombreuses heures, la jeune femme ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle serait certainement mieux à son bureau que là, à regarder les heures filer sans rien faire. Si elle bougeait de son lit, elle ne saurait quoi faire de constructif pour passer ce temps dont elle disposait mais dont elle n’avait pas besoin. Elle détestait les journées de repos, tout comme elle détestait les week-ends où les vacances. C’était trop de temps perdu, trop de temps qui ne servait qu’à ressasser de vieilles pensées, ce dont elle se passait volontiers. Depuis des années, elle avait fait le choix de ne consacrer sa vie qu’à son travail. Du jour au lendemain, elle était passée de la Lyanna pleine de rêve, qui semblait ne pas vouloir rester en place à la jeune femme très terre-à-terre et toujours enfermée dans son bureau. Un changement radical qu’elle ne devait qu’à une personne. Lethbridge, comme elle l’appelait aujourd’hui, avec cette froideur qui désignait l’homme qui avait détruit ses rêves en l’abandonnant du jour au lendemain. Il fallait qu’elle pense à lui, évidemment. Voilà pourquoi elle détestait les journées de repos, parce que les vieilles pensées qu’elle ressassait durant son temps libres, elles étaient presque toujours consacrée au jeune homme, même si elle n’avait plus eu de nouvelles depuis bien des années. Elle aurait dû l’oublier, passer à autre chose comme disait sa mère. Se trouver un homme stable et se poser enfin avec quelqu’un. Elle aurait peut-être dû, oui. Pourtant, elle n’en avait jamais rien fait. Tous les hommes qu’elle avait côtoyés jusqu’à présent étaient plein de défauts. Elle trouvait toujours quelque chose qui n’allait pas et toujours prématurément, elle choisissait de mettre un terme à ses relations. Le seul problème des hommes qui étaient passés dans sa vie, c’était sûrement qu’ils n’étaient pas Rohan Lethbridge. Un commentaire qu’elle se gardait bien de faire ou même d’admettre. Elle le détestait celui là de toute façon et pour cause, en plus de l’avoir abandonnée sans raison apparente, il venait foutre en l’air ses précieux jours de congés. Dans un soupire, elle retira la couette sous laquelle elle était emmitouflée, pour enfin sortir de son lit. Il fallait qu’elle s’occupe au lieu de rester là comme une idiote. Sa journée était perdue d’avance, c’était un fait, mais elle le serait certainement encore plus si elle la passait dans son lit. D’autres y seraient restés, bien ravis de n’avoir rien de mieux à faire. Ce n’était pas le cas de la jeune Moriarty. Rapidement, elle avait quitté son lit pour profiter d’une bonne douche chaude, s’y attardant bien plus que d’ordinaire, puisqu’elle avait du temps à perdre, elle pouvait le perdre sous sa douche si elle le voulait et chaque minute passée la rapprochait un peu plus du jour prochain qui serait sans l’ombre d’un doute bien plus intéressant que cette maudite journée de repos. Elle quitta pourtant sa douche, pour aller piocher dans son armoire de quoi s’habiller, rapidement, elle avait enfilé la première robe lui passant par la main, sans même prendre le temps de vérifier le temps qu’il pouvait faire dehors. Elle savait pourtant qu’elle allait sortir, elle n’avait pas la moindre envie de passer la journée entière cloitrée dans sa maison. Elle avait pensé à Lethbridge plus tôt, ainsi, le seul avantage de cette pensée, c’était qu’elle lui avait donné l’envie de sortir pour aller faire un saut chez Fleury & Bott. Elle passait beaucoup de son temps libre dans cette librairie, toujours à l’affut d’un nouvel ouvrage à acquérir pour occuper les heures où elle ne travaillait pas. Ou peut-être passait-il si régulièrement pour vérifier si le fameux Lethbridge n’avait pas publié quelque chose de nouveau. Elle pouvait bien dire à qui voulait bien l’écouter qu’elle le détestait, les ouvrages les plus cornus – qui dit cornu sous entendu souvent, très souvent feuilleté – de sa bibliothèque étaient bel et bien signés Lethbridge. Heureusement, elle invitait suffisamment peu de gens chez elle pour que quelqu’un puisse noter l’intérêt qu’elle portait encore au sorcier. Quand bien même on remarquerait, elle se défendrait simplement en disant qu’il avait beau être un sale type, il n’en restait pas moins un très bon écrivain. Après tout, il ne pouvait pas être bon partout, il l’était en écriture bien plus qu’il ne l’était en amour ou en amitié.
Après avoir ramassé son sac, enfilé une paire de chaussure et une veste, elle avait simplement transplané au chaudron baveur, accès direct pour le chemin de traverses. Elle s’arrêta cependant quelques minutes dans le petit bar afin de commander un petit déjeuné, qu’elle avala bien rapidement avant de reprendre la route vers son principal objectif, la librairie. Elle connaissait le chemin à la perfection, elle avait si souvent arpenté les pavés de cette rue commerçante, déjà étant enfant, avec ses parents, quand ils devaient aller acheter ses fournitures pour Poudlard et là, bien des années plus tard, simplement pour acheter quelques livres pour s’occuper. Il était clair que les années avaient bien passées depuis qu’enfant, elle traversait cette grande rue, le sourire aux lèvres, tellement pressée d’avoir ses fournitures, car les posséder enfin signifiait que très vite, elle irait à Poudlard. Elle n’avait rien oublié de Poudlard, ce beau château dans lequel elle avait passé tant de temps. Un sourire mélancolique marqua ses joues alors qu’elle avançait lentement, bercée par ses souvenirs d’une époque lointaine, qui au moins n’impliquait pas l’écrivain qui avait perturbé le début de sa journée. Certes, c’était à Poudlard qu’elle l’avait rencontré, mais il n’y avait pas eu que lui et là, sur le chemin de traverses, il n’y avait toujours eu qu’elle et ses parents. Ses parents, n’étaient certainement pas les meilleurs parents du monde, mais aujourd’hui, ils étaient tout ce qu’il lui restait ; sa famille, aussi pourrie soit-elle. Les Moriarty n’avaient pas bonne réputation, ils n’avaient même plus de réputation. Ils étaient tombés dans l’oublie bien des années plus tôt, ils étaient tombés avec le seigneur des ténèbres comme sa mère se plaisait encore à l’appeler. Ça faisait trente longues années que les Moriarty avaient été réduit au silence. Beaucoup avaient fini par bouffer des pissenlits par la racine pendant la Grande Guerre, d’autres avaient été envoyés à Azkaban. Elle avait bien l’impression que seuls ses parents s’en étaient sortis et aujourd’hui, elle devenait la seule héritière des Moriarty, une famille que tout le monde avait oubliée et dont tout le monde se fichait éperdument. Elle, elle s’en fichait. Ce n’était pourtant pas le cas de ses parents et surtout de sa mère, qui restait persuadée que leur famille valait bien mieux que la plupart des familles dont les noms étaient encore reconnus aujourd’hui. Une belle connerie selon Lyanna, enfin, sa mère avait quelques fantaisie bien à elle, mais elle restait sa mère, envers et contre tout, une femme qui, au défaut de bien d’autres personnes dans sa vie, ne l’avait jamais laissée tomber, alors oui, elles avaient quelques différents, mais ça ne venait pas corrompre l’amour qu’elle lui portait. Si un jour Lyanna réalisait ses objectifs les plus fous, elle saurait qu’elle le devrait à sa mère et à personne d’autres, certainement pas au Lethbridge qui avait jugé bon de l’abandonné pour qu’un jour, elle les atteigne ces dits objectifs. De toute façon à cette époque, des objectifs elle n’en avait même pas eu, si ce n’est celui de partir à ses côtés. Il avait tout fichu en l’air lui.
Dans un énième soupire, elle passa le seuil de la petite librairie, souriant à nouveau en entendant la mélodie si familière de la petite clochette de l’entrée. Elle ne mit pas beaucoup de temps à remarquer qu’il y avait un monde fou dans la librairie. Elle ne pouvait même pas dire pourquoi puisqu’elle ne voyait même pas le fond de la salle. Elle n’avait, de toute évidence, pas pris le temps de lire l’écriteau à l’entrée qui devait très certainement tenir les passant informés de l’évènement si particulier qui avait lieu en ce jour. Elle s’en fichait elle. Rapidement, elle s’était dirigée vers les étalages, ignorant le tumulte tout autour d’elle. Son regard fut interpellé par une couverture, portant le fameux nom de Lethbridge. Ce n’était pas un hasard s’il n’avait pas cessé de venir ternir ses pensées depuis qu’elle s’était réveillée. Peut-être qu’elle l’avait su, elle l’avait sûrement lu quelque part puis elle était passée à autre chose ; feintant d’oublier qu’aujourd’hui, le nouveau livre de l’écrivain arrivait sur le marché. Attrapant l’ouvrage, elle laissa échapper encore un soupire. Elle resta un moment à fixer simplement la couverture. Elle voulait l’ouvrir, mais comme à chaque fois qu’elle avait entre ses mains, l’un des livres du jeune homme, elle n’osait pas regarder autre chose que la couverture, pendant un long moment. Finalement, après quelques longues minutes, elle se décida enfin. ‘A Lyanna, à tout ce qui aurait pu être, tout ce qui ne sera jamais’ comme toujours, c’était les premiers mots qu’elle lisait à l’intérieur du livre, toujours la même dédicace. Cette dédicace qui, à chaque fois qu’elle la voyait dans un nouvel ouvrage, semblait lui compressait douloureusement le cœur. Le temps était passé et cette fois encore, il ne l’avait pas oubliée. Le jour où elle ne verrait plus cette phrase en première page d’un de ses livres, ce serait probablement le pire jour de toute son existence, ce jour où il l’aurait définitivement abandonnée, ou il l’aurait complètement oubliée. « Vous savez que l’auteur est en dédicace, au fond de la salle ? » Elle sursauta légèrement, stoppée dans ses innombrables pensées par la voix d’un client qui semblait particulièrement heureux de lui annoncé la nouvelle. « Je viens d’avoir la mienne. » Il se sentit apparemment obligé d’ouvrir son livre devant son nez pour lui montrer la dite dédicace. Elle lui adressa un léger sourire tout en acquiesçant légèrement, réponse apparemment suffisante pour qu’il décide de quitter la boutique, son livre dédicacé serrer contre sa poitrine. Elle regarda la queue pour les dédicaces. Elle se demandait combien des gens présent dans cette queue avaient un jour regardé cette dédicace en première page en se demandant qui pouvait bien être cette Lyanna qu’il citait à chaque fois. Elle le savait, il le savait mais eux, ils l’ignoraient. Elle n’avait pas besoin d’une dédicace puisqu’à chaque fois, elle avait la sienne. En souvenirs de leur passé commun, de ce jour où il était finalement parti en la laissant là, abandonnée à son triste sort. Elle n’avait pas besoin d’une dédicace et pourtant, sans qu’elle ne sache pourquoi, après avoir acheté le livre, elle s’était dirigeait vers la queue, elle s’y était mêlée, comme si ça avait été naturel. Chaque pas qu’elle faisait vers le fond de la salle semblait l’angoisser d’avantage, elle était folle d’agir ainsi et elle sentait bien qu’elle aurait dû simplement partir. Elle avait pourtant envie de le revoir, d’apercevoir son visage, d’entendre le son de sa voix, comme pour rendre encore plus concret tous ses souvenirs qui lui déchiraient le cœur à chaque fois qu’elle y repenser. Le plus présent à son esprit, ça avait été ce jour où il était parti sans elle, ce baiser qu’ils avaient échangé et qui n’avait pas eu l’air de le dérangé, c’était lui qui l’avait convaincue de partir avec lui et pourtant, au moment de partir il avait subitement changé d’avis. Elle n’avait jamais compris pourquoi, elle ne comprendrait peut-être jamais. Peut-être que le baiser avait été déplacé, peut-être qu’il n’attendait pas ça d’elle alors il avait décidé d’éviter les complications en la laissant elle. Elle n’en savait rien, vraiment. Peut-être qu’elle pourrait lui demander. Maintenant qu’elle n’était plus qu’à quelques pas de lui, elle ressentait toute sa rancœur remonter à la surface. C’était presque dix années qui s’étaient écoulées depuis ce jour là, mais la pilule était toujours aussi difficile à avaler. ‘A Lyanna, à tout ce qui aurait pu être, tout ce qui ne sera jamais’ Ces mots suffisaient pour lui rappeler qu’il l’avait laissée tombée au dernier moment, qu’il aurait pu se passer un tas de choses entre eux deux, qu’ils auraient pu rester ensemble, avoir un avenir tous les deux, amants ou amis ça n’aurait pas eu d’importance, mais comme il l’écrivait si bien à jamais, ça n’arriverait jamais, parce qu’il était parti sans elle. Enfin, elle arriva devant lui, il était encore le nez plongé sur le bureau quand elle posa avec force le livre devant lui. Poser était un bien grand mot, finalement, ‘balancer’ était le verbe mieux approprié dans cette situation. « A Lyanna, à tout ce qui aurait pu être, tout ce qui ne sera jamais. C’est ça que j’aimerai comme dédicace Lethbridge. » Elle avait cru que ses mots allaient se nouer dans sa gorge, que sa voix serait tremblante et si peu assurée, pourtant c’était tout le contraire, ses mots avaient été clairs et distinct sa voix froide et pleine de cette rancœur qu’elle portait en elle aujourd’hui plus que jamais. Il avait changé, évidemment, il avait vieillit, pourtant c’était tellement lui, le même homme que dans ses souvenirs, le même homme qui l’avait abandonnée à un destin qu’elle n’avait pas choisi. Tout le monde l’avait poussée dans cette voie sans lui demandé son avis. Lui il l’avait poussé dans cette voie après l’avoir convaincue qu’elle ne devait pas écouter les autres, qu’elle devait faire ses propres choix. Elle l’avait fait son choix, il l’avait rejeté. « L’écriture manuscrite, ça changera un peu, pour une fois. » Elle aurait pu simplement se taire et pourtant elle s’était sentie obligée de rajouter quelque chose, de façon un peu moins agressive que sa première réplique. Finalement, maintenant face à cette vision la condamnant à se replonger au cœur de ses souvenirs, elle se sentait bien mal, partagée entre l’envie de faire une scène au beau milieu de la librairie, libéré toutes les choses qu’elle avait sur le cœur et qui étaient coincée depuis trop longtemps et celle de simplement partir à toute jambes pour aller pleurer dans son coin, tôt ou tard un des scénario se déroulerait, mais pour l’heure, elle restait face à lui, aussi froide que le marbre.
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Sujet: Re: ❝ the trick is, don't fall in love ❞ (rohan) Lun 29 Juil - 13:38
Londres, propice aux rêveries, aux songes torturés. L’allure maussade du temps collait parfaitement à son humeur – et ce matin, aux premières lueurs de l’aurore, Lethbridge avait cru entendre des gouttes de pluie s’écraser avec force contre les carreaux des vitres de la vieille maison familiale. Bien souvent, il se prenait à l’entendre grincer, chanter ses souvenirs en des longues plaintes criardes. Un éclat de soleil n’aurait cependant pas suffi à tirer Rohan de sa mine renfrognée à souhait, et du lourd silence, qui bloquait rageusement ses mots au fond de sa gorge. Rester sur place, n’était pas la meilleure décision qu’il avait prise : l’impétueuse capitale anglaise agissait sur son humeur aussi efficacement qu’une pilule de malheur – aujourd’hui plus que jamais, il s’estimait mieux à sa place à l’autre bout du monde, là où il faisait curieusement, bien moins tâche qu’ici-même. Peut-être avait-il stagner, pendant toutes ces années de fuite, et que la ville anglaise, sans cesse éveillée, évoluant frénétiquement, ne faisait que lui rappeler que le monde, quant à lui, avait tourné toujours plus fort, toujours plus vite sur lui-même. Elle était loin, désormais, la belle Londres qu’il avait connue dans son enfance, dont il avait aimé visiter certains quartiers – le Chaudron Baveur à l’ambiance poussiéreuse, parfumée d’un côté intimiste on ne peut plus plaisant. Les choses étaient compliquées à présent. Compliquées au point d’éveiller en lui le viscéral besoin de fuir. Les mois, les années, avaient en effet transformé ses voyages, découvertes, folies, en une fuite glaçante et épuisante. En avant, toujours en avant – jamais en arrière, là où l’attendaient ses plus précieux cauchemars. Souvenirs d’un autre temps, souvenirs de ces erreurs qui meurtrissaient chaque journée où le soleil se levait à l’est, chaque nuit où le soleil se couchait à l’ouest. Dans une vaine tentative de se défaire de son allure peu engageante, Lethbridge se stoppa devant le premier miroir se présentant à lui : s’y observant longuement, comme s’il s’attendait à voir un sourire apparaître comme par miracle à la commissure de ses lèvres, il réajusta une mèche de ses cheveux – que sa mère aurait trouvé trop longs – remit son nœud papillon droit, et épousseta – en un réflexe maladif – l’épaulette de sa veste. Malgré tous les efforts qu’il pourrait faire, il ne pourrait cependant pas se défaire de l’aspect ancien et miteux qui tirait les fibres de sa veste de tweed : il ne comptait plus les années depuis lesquelles il la possédait, soigneusement rangée dans le placard de sa chambre de jeunesse – n’ayant pas pris la peine de l’emmener avec lui dans ses nombreuses aventures. Voilà où elle en était réduite à présent, elle avait affreusement pris un coup de vieux, ainsi qu’une poussière tenace et malodorante. Il s’en défit donc, la déposant sur le lit, quelques pas derrière lui, pour d’un geste de la baguette, lui redonner son aspect on ne peut plus acceptable : il avait trop peu eu souvent l’occasion de la porter pour s’en débarrasser seulement maintenant, et parvenir à faire jeter quoique ce soit à un sorcier comme Rohan, c’était réussir à obtenir qu’il fasse trente degrés en hiver, dans les profondeurs de l’Ecosse. Apocalyptique.
Satisfait, sa veste à nouveau sur les épaules, Rohan abandonna la longue observation de son reflet dans le miroir, glissant en quelques pas à l’extérieur de la pièce, dévalant les escaliers de bois qu’il connaissait par cœur. D’un geste distrait, avant de quitter la vieille maison, le sorcier saisit au passage le vieux parapluie de son père, le glissant sous son bras – les intuitions de Lethbridge ne le trahissaient que rarement, et dans l’air flottait l’âpre sentiment qu’une nouvelle pluie allait s’écraser sur les pavés parfaits de Londres. Pendant bien longtemps après son départ, il y a de cela bientôt dix ans, le jeune homme qu’il avait été, avait souhaité traversé de nombreux pays tropicaux, chauds et réconfortants ; bien différents de la capitale anglaise, dont le temps pluvieux et nuageux ne lui manquait que très peu. C’étaient ses obligations qui le ramenaient ici, celles-ci, ainsi que son tout nouvel engagement, l’ardent et silencieux désir de rendre honneur à ses parents – une seule fois dans sa vie. Ultime, fatidique fois. Jamais il n’avait su si ceux-ci étaient un tant soit peu fiers du fils qu’il était devenu, mais les connaissant comme il les avait connus, Rohan était surtout persuadé que sa mère se préoccupait de son célibat permanent, et son père de son absence cruelle de revenus réels. Ses livres se vendaient bien, pourtant, mais aussitôt qu’il touchait quelque rente de son long travail, Rohan disparaissait à nouveau, dilapidant le tout dans des dépenses secondaires, en des gadgets qu’il ramenait chez lui et entassait dans un coin, bouffant lentement mais sûrement l’espace vital de la famille Lethbridge-Stewart. Poussant la porte du Chaudron Baveur, Rohan s’y stoppa longuement, obéissant à une lubie le prenant au corps, à la manière d’une incapacité brutale à aller plus avant. La gloire qui découlait de ses livres de plus en plus nombreux sur les étalages des librairies, n’était pas forcément pour lui déplaire, pas forcément pour le pousser à marcher plus vite non plus. Accoudé au comptoir presque vide du pub, patientant soigneusement pour le thé matinal qu’il avait commandé, Rohan crut sentir de nombreux regards s’attarder sur sa silhouette de dos : sans doute à cause de sa veste en tweed. Il crut entendre quelques personnes murmurer frénétiquement des paroles sur ses chaussettes rayées de multiples couleurs, qui étaient facilement détectables entre son pantalon noir et ses chaussures en cuir. N’importe quelle personne un tant soit peu soigneuse aurait pris le temps de trouver des chaussettes noires afin que rien ne sorte de l’ordinaire si plaisant à tout le monde, mais Rohan n’était certainement pas n’importe quelle personne. Un coup d’œil à sa montre suffit à lui indiquer qu’il avait une demi-heure d’avance – et un magicien n’arrive jamais en avance – Rohan s’octroya le luxe d’une longue pause dans la chaleur réconfortante du Chaudron Baveur : de l’autre côté, là où les briques s’écartaient pour former l’ouverture du Chemin de Traverse, les choses seraient différentes. Car les allées remplies d’échoppes en tout genre, de commerces habituellement remplis, de sorciers en effervescence, étaient à présent les scènes d’autres histoires. Sombres histoires. La guerre flottait, perfide et venimeuse, dans l’atmosphère du Chemin de Traverse, empoisonnant les esprits et les humeurs de chacun. A cette idée, l’œil plongé dans son thé ténébreux, Rohan fronça les sourcils, farfouillant dans la poche intérieure de sa veste pour en sortir son petit carnet de route. Un énième d’une très longue liste de carnets : ceux-ci étaient des simples objets moldus, sans aucun ensorcellement quel qu’il soit, ainsi, en dix ans, Rohan avait eu le temps d’en remplir, des pages et des pages, dont certaines avaient fini par composer un livre. Deux livres. Une dizaine, un peu plus d’une dizaine. Et ainsi de suite. Tout ce que devait savoir le public, était là-bas, à vendre dans les rayonnages des librairies du monde magique. Tout ce qui importait était là, toujours avec lui, au creux de cette poche, à portée de main.
Dans son monde, ce monde accessible à de rares élites seulement, happé par les croquis qui envahissaient certaines pages, les écrits en pattes de mouches sur les autres, Lethbridge laissa le temps filer. Encore. Infiniment rapidement, avant que la réalité ne se rappelle à lui. Brusquement, sans autre forme de procès, quelqu’un vint brusquement s’asseoir à côté de lui, l’arrachant à cet univers mystérieux, dangereux et désormais si lointain. Disponible que sur quelques pages. C’était terriblement frustrant, lui qui avait écrit pour offrir son expérience aux autres, il se rendait compte, plus que jamais, des capacités limitées de ces ouvrages sur papier : le monde était bien plus virulent, bien plus beau vu de dehors, qu’à travers les mots choisis maladroitement par un imbécile comme lui. Sa fuite avait été merveilleuse. Unique. Plus éphémère que jamais. Amer, la gorge asphyxiée par l’âpre sentiment d’inaction, Rohan finit par ranger son petit carnet, adressant un sourire contrit au serveur face à lui, avant de lui lancer quelques gallions pour la course. Finalement, il n’avait même pas touché à son thé, mais il se rendit sans se retourner dans la petite salle au fond du pub, frappa sur la brique à gauche et s’offrit, à cet univers hostile du monde réel. Comme il l’avait senti dans ses pressentiments, le Chemin de Traverse ne brûlait plus de l’impatience joyeuse qu’il lui connaissait autrefois ; ici, dans le décor pluvieux qui s’offrait à ses yeux, certains sorciers avaient même le regard baissé, et ne portaient que peu d’intérêt aux vitrines flamboyantes qui s’offraient à eux. Les boutiques encore ouvertes semblaient faire tout leur possible pour redonner leur joie de vivre à ces lieux, mais l’effort semblait vain. Du moins, au premier coup d’œil. La guerre – ou ce qu’on murmurait comme tel – ne lui allait pas à l’humeur, définitivement. Mais en un imperceptible sourire, caressant la surface de ses lèvres, Rohan releva les épaules, enfonça ses mains dans ses poches et s’engagea dans la foule du Chemin de Traverse. Très vite, quelques personnes l’alpaguèrent, engageant la conversation avec lui ; en plus d’être un gamin qui avait acheté ses premières fournitures pour Poudlard ici-même, il était désormais un auteur dont la photo s’étalait sur la quatrième de couverture de chacun de ses livres, s’agitant d’une manière qu’il ne lui ressemblait que trop peu : le photographe avait absolument tenu à ce que Rohan retrace l’apparence d’un sorcier sage et réfléchi, tout ce qu’il n’était pas, en somme. Parfois, sa survie, il la devait à de simples coups de chance – ou à des coups de folie pure et dure, et ce n’était pas la chose dont il se cachait, généralement. « Ah, Mr Lethbridge, quel plaisir de vous rencontrer. » L’homme qui l’attendait à l’entrée de chez Fleury et Bott l’accueillit en quelques paroles chaleureuses, ainsi qu’une poignée de main on ne peut plus énergique. Depuis la dernière fois qu’il s’était arrêté assez longtemps à Londres pour se livrer à de telles cérémonies qu’une séance de dédicaces, le propriétaire des lieux avait changé, et semblait se vouloir beaucoup plus officiel que le précédent. Avec sympathie et retenue, Rohan répondit à cette entrée en matière on ne peut plus plaisante : il avait encore de l’avance, mais d’ici peu, les choses importantes allaient commencer. Et l’agitation, saisissante dans toute la boutique, se faisait sentir jusqu’au fond de celle-ci, là où Rohan s’installa pour entamer de longues heures de dur labeur. Et dire que, même pour écrire ses propres ouvrages, l’auteur n’avait jamais pris le temps de s’asseoir à une table, tranquillement comme il le faisait là. Si on le lui avait demandé, il aurait préféré signer ses livres sous un beau soleil d’été, dans un champ, assis sur une branche d’arbre, ou au bord d’un lac, assis sur un banc.
Mais pour ces choses on ne peut plus officielles, réclamant organisation et rigueur, on ne lui demandait que très rarement son avis. Il s’y était fait, avec le temps, et c’est en ajustant ses lunettes rondes sur son nez, affichant son sourire le plus sympathique, que Rohan débuta la périlleuse tâche qui devait lui prendre une bonne partie de la journée. En ces temps froids et compliqué, la librairie Fleury et Bott avait cru bon d’organiser un événement pareil, en vue de la nouvelle sortie du dernier ouvrage de Lethbridge, afin de raviver l’envie de chacun de sourire – et les affaires de la boutique, par la même occasion. Rohan ne pouvait pas s’en plaindre, lui aussi, avait besoin de gagner son pain – quand bien même, il avait hérité de sa mère une sacrée fortune, à laquelle il se mettait un point d’honneur de ne toucher qu’en cas d’extrême urgence. J’aime vraiment ce que vous écrivez, continuez comme ça !, Je peux avoir une photo ? – les figures, les paroles, les personnes défilaient à toute allure, et avec chacune d’elles, Lethbridge tentait d’échanger quelques mots – parlant gnomes, dragons, sphinx, licornes et tout ce qui s’apparentait de près ou de loin à une créature magique ; relatant les aventures des personnages fictionnels qu’il avait construits de toute pièce, souriant aux paroles flatteuses – il en croisait de tout genre, des fans de ses ouvrages, des réservés, des scientifiques, des fanatiques, des extravagants, presque comme lui. En peu de temps, son poignet en devint douloureux, mais il s’échinait à continuer, encrier et plume à portée de main, là où un coup de baguette magique, ou une plume à papotte auraient suffi. Et finalement, en un lourd fracas, le voile de doucereuse illusion s’écrasa à même la table, dans le même mouvement que l’épais ouvrage qu’on lui offrait devant les yeux, sans aucune autre forme de procès. La voix cingla, familière. Familière. Rohan sentit son cœur s’arrêter au fond de sa poitrine, sa gorge se serrer instinctivement, à la recherche désespérée d’air pour faire fonctionner son corps. De longues secondes, il lui sembla être suspendu ainsi, pris dans l’admiration de la couverture de son propre livre. Rien. La main posée sur la table, le regard baissé, il aurait voulu fuir. Fuir plus loin, plus vite, plus longtemps que jamais. Jamais il n’avait été assez brave pour affronter ça – et jamais il ne le serait. Le retour à la réalité. L’éclat blanc et brutal de son passé. La haine, brillant au fond des yeux de Lyanna. D’un geste lent, pesé, réfléchi – mathématique – il vint saisir la branche de ses lunettes, du bout des doigts, les enlevant de son nez pour relever le regard – enfin – vers elle. Un visage familier, terriblement familier, synonyme des pires hontes de sa vie. Des dernières décisions qu’il avait accepté de prendre, avant de ne plus jamais répondre de rien. Ne jamais assumer. Elle avait toujours ce quelque chose d’exceptionnel, cette allure qui avait gravé chaque mouvement de cette statue de marbre, gravée au fond de ses prunelles, sur le voile de ses paupières. Lyanna, toujours et jamais. Le conte larmoyant de leurs vies communes, emmêlées l’une à l’autre. Presque par défit, dépit, folie, il se saisit finalement du livre, l’ouvrant sur la première page, là où étaient inscrites dans le papier ces quelques lignes, estafilade éternelle à son cœur. Sa plume en main, il retraça la citation avec sa propre écriture, comme elle le lui avait demandé, chaque lettre se faisant plus douloureuse à ses doigts que la précédente. A Lyanna, à tout ce qui aurait pu être, tout ce qui ne sera jamais. La fin de son martyr imposé arriva vite cependant, tandis qu’il regardait à nouveau la jeune femme – le temps lui avait paru si long, aussi long que celui qui les séparait à présent – ils n’avaient parcouru, face à face, qu’une poignée de secondes. Fermant à nouveau celui-ci, Rohan le fit glisser sur la table en direction de Lyanna, lui adressant un léger sourire. « Tu aurais dû écrire une lettre à mon éditeur, il t’aurait envoyé un livre dédicacé plus tôt. » Son regard glissa, de haut en bas, ou vers sa main, toujours posée sur le livre. De honte devant les propos qui venaient de s’arracher à ses lèvres. Il aurait voulu trouver autre chose à dire, sur cette mélodie terriblement indifférente, pesée. Si professionnelle, pour un homme comme lui. Il ne manquait plus que ça, qu’une troupe de fans en folie découvrent l’existence de la fameuse Lyanna à qui il dédicaçait ses ouvrages. Sa vie. Longuement, il laissa ses doigts sur le bord de la couverture du livre, comme s’il attendait qu’elle tente de s’en saisir pour lui arracher un toucher instinctif, une fraction de seconde de ce bonheur sur lequel il avait craché il y a des lustres. Mais rien. Il détacha finalement sa main de l’objet, renonçant, comme il l’avait tant fait déjà. « Ça fait du bien, de te revoir. » Elle pouvait lui cracher sa haine à la figure, si tant est qu’elle croit ces paroles qu’il venait de prononcer : ça faisait du bien, de la revoir. Vraiment. Un bien assassin, une douce mort à ses convictions de toujours. Il le pensait ; le lui de ces dix longues années passées à vivre dans un souvenir infini, déchirant. Ils n’étaient destinés qu’à vivre de ça, de tristes miettes là où l’avenir, n’était définitivement pas pour eux.
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Sujet: Re: ❝ the trick is, don't fall in love ❞ (rohan) Ven 2 Aoû - 9:08
“ how does it feel to be good ? ”
you fought so hard for your mind you rewrote every worthless line, if I come around for minemake it easy on your time.
Des années plus tôt, elle avait été prête à partir à l’aventure en compagnie de Rohan. Tout ce qu’elle connaissait du monde, c’était ce qu’elle avait lu dans les bouquins. C’était l’inconnu qui s’était dressé devant elle, une chance de découvrir bien des merveilles, de voir des choses de ses propres yeux. Une chance d’être avec lui. Elle l’aurait suivit jusqu’au bout du monde. Il lui avait ouvert les yeux sur ce qu’elle était, sur ce qu’elle valait. Il lui avait montré qu’elle pouvait vivre sa vie comme elle l’entendait plutôt que de continuer à agir comme ce que ses parents attendaient d’elle. Elle avait toujours était cette fille qui suivait aveuglément les choix de ses parents, cette femme qui semblait incapable de décider par elle-même et qui se laissait manipuler comme un vulgaire pantin. Elle sortait tout juste de Poudlard ce jour où, elle avait choisi de l’écouter lui et de prendre sa vie en mains. Le premier choix qu’elle faisait pour elle-même, c’était de le suivre. Elle lui avait si souvent répété que les plans qu’il avait, les voyages qu’il voulait faire, ça ne relevait que de la folie, du rêve, de l’improbable. Pourtant, elle l’avait toujours admiré, parce qu’il s’en fichait, lui il y croyait. Elle s’était surprise à y croire aussi. Dans sa tête, elle était déjà partie avec lui, elle s’imaginait déjà en train de découvrir toutes ces choses dont ils avaient déjà parlé, elle s’était imaginé une vie meilleure bien meilleure que celle que lui réservait ses parents, bien meilleure que celle qu’elle avait en ce moment. Jamais elle n’avait compris pourquoi, après avoir glissé toutes ses idées, tous ces rêves au fond de sa tête, il lui avait tout reprit de façon bien brutale. Elle n’avait jamais comprit pourquoi il avait décidé de la laisser derrière lui, de partir seul dans cette aventure dont elle avait rêvé pendant quelques instants. Peut-être y avait-elle toujours rêvé, mais pendant ces quelques instants, ça ‘avait pu été un rêve fou et irréalisable, ça avait été un rêve qu’elle pouvait atteindre simplement en tendant le bras vers l’avant. Puis il avait tout brisé. Elle aurait pu partir seule. Elle était grande, elle faisait ce qu’elle voulait de sa vie, c’était lui qui lui avait dit ça, elle pouvait partir toute seule. Mais sans lui, le rêve perdait de sa valeur, les paysages éclatant qui se dessinaient dans son esprit étaient devenus ternes et tristes. C’était avec lui qu’elle voulait découvrir le monde, lui et personne d’autre. Voyager et Rohan étaient deux choses qui à ses yeux n’allaient pas l’une sans l’autre. Il avait été une partie de se rêve et il était celui qui l’avait rendu plus improbable que jamais. Il l’avait laissée là, à son triste sort pour ne plus jamais revenir vers elle. Elle n’avait pas eu la moindre nouvelle pendant toutes ses années, juste des bouquins qui décrivaient des paysages qu’elle aurait du voir avec lui et une dédicace dans chacun d’entre eux. Toujours la même, cette phrase qui lui rappelait encore et toujours tout ce qu’elle aurait pu avoir et qu’elle n’aurait jamais, ce rêve qui s’était retrouvé avorté bien trop tôt à son gout. Cette histoire d’amour en laquelle elle avait cru et qu’il n’avait jamais été plus loin qu’un simple baiser échangé. Elle s’en souvenait pourtant comme si ça avait été hier de ce baiser. Ils étaient jeunes à cette époque et pourtant ce baiser resterait à jamais le meilleur baiser auquel elle avait eu le droit durant toute sa vie. Des hommes elle en avait connu, des histoires, elle en avait vécues mais rien n’était comparable aux quelques instants, aussi courts eurent-ils étaient, qu’elle avait eu avec Rohan. Il avait été à la fois sa plus belle et sa plus courte histoire d’amour. Celle qui resterait à jamais graver dans sa mémoire, celle qui était aussi belle qu’elle était douloureuse, celle qui aurait pu être mais qui ne serait jamais. C’était les propres mots de l’écrivain. Les mots de celui qui avait fait en sorte que ça ne soit jamais. Celui qui aurait méritait qu’elle le déteste de tout son cœur qu’elle l’oublie, qu’elle fasse sa vie jamais plus repenser à lui et pourtant il n’en était rien. Elle le détestait, c’était ce qu’elle disait à qui voulait bien l’entendre, mais elle ne le détestait pas assez sincèrement pour l’effacer de sa vie et aller enfin de l’avant.
C’était de la folie pure et dure qui l’avait poussée à se mêler dans la queue pour obtenir une dédicace de la part du sorcier. Elle n’en avait pas besoin, elle en avait déjà une après tout. Elle aurait mieux fait d’acheter le livre et de s’enfuir à toutes jambes. C’était ce que lui il avait toujours fait après tout. Fuir ; la fuir. Il n’avait jamais eu la force de l’affronter à nouveau après l’avoir abandonné, de nombreuses années plus tôt. Jamais il n’avait essayé de la revoir, ou alors, jamais il n’était allé au bout de la manœuvre, puisque que jamais elle ne l’avait revu. Il ne restait plus rien d’eux aujourd’hui, il n’y avait aucune raison pour qu’elle avance vers ce bureau, il ne le méritait même pas. Ce n’était pas à elle de faire l’effort d’aller jusqu’à lui, après tout, elle avait été celle qui avait été prête à le suivre jusqu’au bout du monde, pas celle qui l’avait lâchement laissée tomber pour une raison inconnue. Prise dans cette queue, elle avait bien souvent envisagé de s’en aller, tracer son chemin pour oublier cette histoire folle, cette folie qui lui torturer déjà suffisamment le cœur et l’esprit alors qu’elle n’avait même pas revu son visage. Pourtant, elle était restée. Poussée par la folie ou par une autre force, elle n’en savait rien. Là où elle entendait les gens râler parce que la file n’avançait pas assez vite, elle, elle avait eu l’impression que ça avançait étonnamment vite. Au bout de cette file, elle ce n’était pas juste une dédicace qu’elle aurait ; ce serait un véritable voyage dans le temps. Elle serait ramenée à une époque qui pourtant était révolue depuis bien des années. Une époque qu’elle aurait dû oublier, qu’il aurait dû oublier au lieu de s’efforcer de lui offrir une dédicace à chaque livre qu’il publiait. Peut-être que ça aurait été plus simple si elle avait continué de penser que là où il était, il avait complètement oublié la stupide Lyanna qui avait voulu venir avec lui. En même temps, elle n’avait pas envie qu’il l’oublie, parce qu’elle, elle ne pouvait pas l’oublier. Avec ou sans dédicace, il aurait été là, à jamais dans un coin de son esprit et de son cœur. Il était là, depuis toutes ses années et inlassablement, il continuait de la faire souffrir comme il l’avait fait ce jour là en décidant de partir sans elle. Elle ne savait pas ce que lui il ressentait vis-à-vis de cette décision qu’il avait prise à ce moment là et qui les avait séparés, peut-être que ça n’avait pas d’importance pour lui, mais ce serait tellement injuste qu’elle soit la seule à se noyer dans le regret à chaque fois que cette histoire refaisait surface dans son esprit. C’était lui qui méritait de souffrir pour ce qu’il lui avait fait. Ce qu’elle savait, c’était que, malgré tout, c’était elle qui avait encore et toujours ce gout d’amertume au fond de la bouche et cette plaie douloureuse au fond de son cœur. Lui, elle ne pouvait pas savoir ce qu’il ressentait puisqu’il n’était revenu vers elle. Elle était sûre pourtant, que ce n’était pas la première fois qu’il remettait les pieds à Londres depuis presque dix ans. Il avait du revenir un tas de fois, pour des raisons diverses et variées mais certainement pas pour elle. Elle ne devait pas valoir grand-chose finalement à ses yeux, un vieux souvenir de ce qui aurait pu être et qui ne sera jamais et puis basta.
Arrivée enfin devait l’écrivain, elle ne fit pas franchement preuve de courtoisie. Il ne le méritait pas de toute façon. Elle s’était montrée froide et cinglante, il ne valait pas mieux que ça. Contrairement aux autres personnes qui faisaient la queue derrière elle, elle n’était pas du tout en admiration devant lui. Elle l’avait été à une époque, une vieille époque, avant qu’il ne mette un terme à tout ça. Maintenant elle n’avait plus rien à admirer. Elle pouvait le détester pour ce qu’il lui avait fait – au moins croire qu’elle le détester – elle pouvait le jalouser, parce qu’au final elle avait été la plus ambitieuse des deux et il était celui qui avait le mieux réussi sa vie, mais elle n’allait certainement pas l’admirer et encore moins le féliciter pour son fabuleux travail. Ses livres il les écrivait presque à ses dépends. Peut-être que c’était pour ça qu’il n’avait pas voulu d’elle à ses côtés, il avait peut-être pensé qu’elle serait un frein à sa carrière d’écrivain, alors il avait préféré la laisser derrière lui. Au moins si tel était le cas, il pouvait se vanter d’avoir fait le bon choix, sa carrière il l’avait plutôt bien réussi. En un rien de temps, il avait percé dans le milieu, alors qu’elle, au ministère de la magie, même avec le travail le plus appliqué du monde, les heures supplémentaires qu’elle faisait sans rechigner, sans même demander plus d’argent, elle n’était que membre du mangenmagot, une parmi tant d’autre et son patron n’arrivait qu’à peine à retenir son nom. Elle ne baissait pourtant pas les bras, son travail, c’était tout ce qu’elle avait et elle y tenait plus qu’à n’importe quoi. Son ambition était telle qu’elle savait qu’un jour elle irait plus loin, il lui fallait juste plus de temps qu’il n’en fallait à Lethbridge. Elle lui avait balancé le livre sous le nez et maintenant, elle le regardait écrire à nouveau cette maudite phrase dans le livre. Aussitôt qu’il eut fini, elle récupéra le livre, presque prête à dégagé le terrain, pourtant les mos qu’il prononça la fit cite changer d’avis et elle lui adressa un regard tellement froid que si elle avait pu tuer quelqu’un d’un simple cou d’œil, il serait mort sur place. « J’aurais du envoyer une lettre à ton éditeur Lethbridge ? Tu ne crois pas plutôt que tu aurais pu m’en envoyer une lettre toi ? On venir toi même me dédicacer ton maudit bouquin ! » Après qu’il l’ait laissé tombée comme il l’avait fait, peut-être qu’elle aurait bien mérité ça. Enfin si elle n’était pas venue aujourd’hui – ce qu’elle aurait dû faire – il était clair que jamais elle n’aurait eu une dédicace écrite de sa propre main. Il n’avait apparemment plus grand intérêt pour elle aujourd’hui, sinon, il serait venu de lui-même et bien avant aujourd’hui. Pourtant, d’après ses propres dires, ça faisait du bien de la revoir. A cette réplique, elle laissa un rire ironique s’échapper de ses lèvres. « Alors pourquoi t’es jamais revenu ? » Son livre serré entre les doigts, elle baissa un court instant les yeux vers le sol. Savoir pourquoi il n’était jamais revenu, pourquoi il était partit sans elle, c’était tout ce qu’elle avait toujours voulu, maintenant cependant elle n’en n’avait pas forcément envie. Il y avait des gens qui rouspétaient derrière elle, parce qu’elle avait eu son autographe mais qu’elle continuait de bloquer le passage. Elle devait bien admettre qu’elle n’avait aucune envie d’étaler sa vie devant ces gens, elle serra son livre contre sa poitrine en relevant la tête vers le sorcier, avant de hausser légèrement les épaules. « C’est pas réciproque, ça fait pas du bien de te revoir, pas après tout ce temps. » Plus que jamais, elle sentait son cœur se faire douloureux, plus que jamais elle pensait à tout ce qui pourrait être et qui ne serait jamais et dans son propre cœur, ça faisait un mal de chien. Elle n’aurait pas du suivre cette maudite queue. « Enfin, ça n’a plus d’importance aujourd’hui de toute façon. Merci pour la dédicace, bonne continuation. Je te laisse à tes fans, ça fait des années qu’ils reçoivent bien plus d’attention de ta part que moi. » Elle pinça légèrement les lèvres avant de faire volte face. Elle lui en voulait pour ça aussi. Parce qu’il revenait à Londres pour déposer sa signature dans le livres de gens qu’il ne connaissait pas et qu’elle, il n’était pas venue la voir. Elle s’éloigna enfin, don livre toujours serré contre sa poitrine. Enfin, elle retrouvait l’avant de la boutique, enfin elle avait l’impression de pouvoir respirer. Elle quitta rapidement la boutique pour retourner dans les rues de la ville, dans un soupire, elle s’adossa au mur de la librairie. Elle n’aurait pas du venir jusqu’ici. Elle en restait convaincue et pourtant, elle ouvrit son livre pour passer son doigt sur l’écriture manuscrite du sorcier, un léger sourire sur les lèvres, un sourire bien vite trahit par les larmes naissantes au coin de ces cils. C’était ça, le seul vestige de la vie qu’ils avaient eu, cette phrase écrite de sa main dans ce livre.
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Sujet: Re: ❝ the trick is, don't fall in love ❞ (rohan)